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Phare Felue pérégrine
21 octobre 2013

La métamorphose, Corbeyran et Horne

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"Lorsque Gregor Samsa s'éveilla un matin, au sortir de rêves agités, il se trouva dans son lit métamorphosé en un monstrueux insecte." Kafka

La collection Ex-Libris de Delcourt se propose d’adapter des œuvres majeures de la littérature en bande-dessinées. On pense ce que l'on veut de ce principe; pour ma part, je suis toujours tentée d'aller voir de plus près ce genre de projet. Cela peut permettre d'amener des adolescents à lire des oeuvres littéraires qu'ils n'auraient peut-être jamais ouvertes. L'adaptation n'en demeure pas moins une oeuvre en elle-même; et celle-ci me paraît réussie.

En quelques mots, si vous ne connaissez pas le récit de Kafka, de quoi s'agit-il? Un matin, Gregor s'aperçoit que son corps est recouvert d'une carapace et que des pattes lui ont poussées pendant la nuit. Il ne s'affole pas outre mesure, croyant d'abord à un rêve. Mais la métamorphose va être confirmée par le regard que portent ses proches sur lui: son père, sa mère, sa soeur, la bonne... Il s'est bel et bien transformé en blatte... !

Que va t-il devenir? Comment sa famille, qui comptait sur les revenus de Gregor, va t-elle subsister? Et comment vont évoluer les relations de Gregor et de ses proches?

La gageure, pour les auteurs de cette bande dessinée (Corbeyran pour le scénario, Horne pour le dessin et la colorisation), consistait à faire en sorte de maintenir le lecteur en haleine en dépit du fait que le récit se passe dans un huis-clos, l'appartement familial. Pari remporté, me semble t-il. Un système de cases imbriquées sur la page (voir ci dessous les premières planches), une bonne maîtrise du rythme, une utilisation judicieuse de la couleur... autant d'atouts qui font que l'attention du lecteur ne se relâche pas.

METAMORPHOSE01

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METAMORPHOSE04

METAMORPHOSE05

Vous pouvez aller lire les 8 premières planches  ici

Le choix d'un univers où le noir et le gris -dans toutes leurs subtiles nuances- dominent s'avère particulièrement judicieux, et fidèle à l'esprit de la nouvelle de Kafka, plutôt sombre, dans laquelle l'angoisse prégnante progresse de façon croissante.

La nouvelle de Kafka, extrêmement riche sur le plan symbolique, a donné lieu à une multitude d'interprétations. On a pu voir La métamorphose comme  une allégorie de la maladie, de la solitude, de la réclusion, de la dépendance ou du vieillissement. Le récit pose assurément des questions sur le regard de l'autre, sur l'incidence de la (non)considération d'autrui sur l'estime de soi, sur la façon dont on peut supporter la différence... Sur ce qu'est l'humanité dans son essence, aussi. Gregor, désormais privé de l'apparence humaine et ne pouvant plus communiquer, n'en a pas perdu pour autant sa conscience, son intelligence, sa sensibilité humaines.

Un internaute sur Babelio a ainsi pu dire que Gregor, c'était "un homme dans un corps d'insecte" "entouré d'insectes dans des corps d'humains". Phrase intéressante.

A mon sens, la BD ne réduit pas cette richesse infinie du texte de Kafka, ni le champ des possibles en matière d'interprétations. Au contraire, elle amène à poursuivre le questionnement.

 

Je ne peux dire si pour quelqu'un qui n'aurait pas lu la nouvelle, cette BD serait "réductrice". La montée de l'angoisse est certes moins prégnante dans la BD que dans la nouvelle (ne serait-ce qu'en raison du "temps" de lecture, plus restreint); mais on retrouve l'atmosphère noire et sombre du récit; et la fin invite le lecteur à se replonger dans la réflexion, voire à relire la BD ou l'oeuvre de Kafka.

En résumé, c'est une lecture que je vous conseille vivement: que vous ayez lu ou non la nouvelle auparavant, vous pourrez difficilement ne pas être intéressé(e). :)

"En écoutant ces paroles de sa mère, Grégor se rendit compte que le manque de toute conversation humaine directe,allié à cette vie monotone au sein de sa famille,lui avait sûrement troublé l'esprit tout au long de ces deux mois."

"Avait-il réellement envie que cette pièce douillette,agréablement installée avec des meubles de famille,se métamorphosât en un antre où il pourrait certes évoluer à sa guise en tous sens,mais où en même temps, il ne pourrait qu'oublier rapidement, totalement, son passé d'être humain?"

Vous pouvez aussi aller lire l'avis d'un critique BD: ici

et celui de Livraddiction : ici

 

 

 


 

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Commentaires
P
Ah, j'ai déjà feuilleté celle dont tu parles en librairie, mais ne l'ai pas encore lue en entier. J'aime bien aller lire les bandes-dessinées adaptations, parfois on a de chouettes surprises oui ! :)
D
J'avais adoré l'oeuvre de Kafka , tu me donnes envie de lire cette BD. <br /> <br /> Dans le même style, j'ai découvert une BD qui reprend L'étranger, de Camus (BD de Jacques Ferrandez,sortie en avril 2013). <br /> <br /> Se replonger dans les grands romans est agréable.
L
rien qu'à l'idée... brrrr... même pour une petite araignée je ne fais pas la fière... :(
P
Hi hi. C'est une "fausse" bestiole. Mais je comprends. ^^
L
Pas pour moi, j'avais déjà trouvé le roman atroce à lire, j'aime pas les bestioles ! ça risquerait de m'empêcher de dormir !!!!
Phare Felue pérégrine
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